L’eau sur Mars

Reull Vallis
Une vue topographique dans Hellas Planitia créée à partir d’observations par l’instrument HRSC de la sonde européenne Mars Express. L’échelle des couleurs fait bien apparaître le contraste entre les zones basses en bleu à gauche et la région plus élevée de Promethei Terra à droite. On aperçoit ainsi clairement un chenal appelé Reull Vallis qui dans cette zone atteint une largeur de sept kilomètres et une profondeur de 300 mètres. En tout, Reull Vallis s’étend sur plus de 1500 kilomètres sur Mars et est probablement le fruit de l’écoulement d’une rivière il y a des milliards d’années. Crédit : ESA/DLR/FU Berlin/G. Neukum

De nos jours, l’eau sous forme liquide ne peut plus exister de façon permanente à la surface de Mars car la pression atmosphérique et la température sont trop faibles. Des écoulements intermittents d’eau très salée ont cependant été observés indirectement par la sonde Mars Reconnaissance Orbiter en 2015.

A une époque très reculée, que l’étude des cratères d’impact place autour de quatre milliards d’années, l’atmosphère de Mars était probablement similaire à celle de la Terre et permettait l’existence d’eau liquide en grandes quantités. Les sonde martiennes ont ainsi révélé des formations créées par des rivières, des deltas et des lacs il y a des milliards d’années, et peut-être même les traces d’un ancien océan.

Absence de tectonique des plaques

Les planétologues pensent que la divergence entre Mars et la Terre est liée à la tectonique des plaques.

L’origine de l’atmosphère des planètes telluriques est la libération, par l’intermédiaire des éruptions volcaniques, des gaz contenus dans les roches après la phase de formation. Il s’agit principalement du gaz carbonique (CO2), de l’azote (N2) et de la vapeur d’eau (H2O). Le gaz carbonique va par l’intermédiaire de l’effet de serre réchauffer la planète ce qui peut permettre à l’eau liquide d’exister.

Mais un autre phénomène se produit qui peut tout remettre en cause : les chutes de pluie. Comme l’eau de pluie dissout facilement le gaz carbonique présent dans l’atmosphère, elle peut l’entraîner avec elle et rapidement le réinjecter dans le sol.

L’eau peut ainsi être à l’origine de sa propre perte. En effet, le niveau de gaz carbonique atmosphérique va alors baisser, ce qui entraîne une chute de la température car l’effet de serre perd en intensité, et l’atmosphère devient finalement trop froide pour permettre l’existence d’eau sous forme liquide.

Dans le cas de la Terre, la tectonique des plaques et le volcanisme actif réintroduisent en permanence le gaz carbonique dans l’atmosphère, assurant ainsi l’équilibre et la stabilité que nous connaissons.

Pour Mars, par contre, l’absence de tectonique des plaques empêche le recyclage du gaz carbonique. L’activité volcanique originelle a probablement produit une atmosphère qui subsista pendant quelques dizaines de millions d’année et permit à l’eau liquide de former rivières et vallées, mais l’absence de tectonique des plaques a limité la durée de cette période.

Link sur Mars
Un gros-plan de l’affleurement Link pris en septembre 2012 par le rover Curiosity. L’affleurement est composé de graviers qui se sont liés ensemble grâce à un ciment naturel. Des cailloux ronds sont présents, ce qui indique qu’ils ont été transportés avant de former les roches. Certains atteignent plusieurs centimètres et sont trop gros pour avoir été déplacés par le vent, ils ont donc été transportés par de l’eau sous forme liquide dans un passé lointain. Les graviers à gauche devaient à l’origine faire partie de l‘affleurement, mais l’érosion les a fait retomber sur le sol. Crédit : NASA/JPL-Caltech/MSSS

Permafrost et calottes polaires

De nos jours, l’eau existe encore en grandes quantités sur Mars, mais pas sous forme liquide.

Il existe d’abord dans le sous-sol martien une couche de glace d’eau solide appelée le permafrost. Les sondes nous ont par exemple envoyé des images de la surface montrant des résidus de glissements de terrain et les signes d’anciens flots liquides assez importants.

Ces formations ont dû apparaître lorsque cette glace a été réchauffée localement, soit par des volcans, soit par des impacts de météorites, puis a fondu et s’est précipitée vers la surface en entraînant l’effondrement des couches supérieures.

Il y a également de l’eau sous forme de glace dans les régions polaires. Ces dernières sont recouvertes par des calottes blanches dont la taille varie avec les saisons.

En fait, ces calottes d’une épaisseur de l’ordre du mètre sont constituées de deux couches différentes : une calotte de glace d’eau et une calotte de glace de gaz carbonique (ou neige carbonique).

Même en été, la température de Mars est trop basse pour que l’eau fonde et il y a donc une première calotte permanente constituée de glace d’eau. A cela s’ajoute la deuxième calotte constituée de neige carbonique dont l’épaisseur varie avec les saisons.

En été, le gaz carbonique est sous forme gazeuse et ne participe pas à la couverture des pôles. En hiver, le gaz se solidifie et recouvre la première calotte. C’est là l’origine des variations que les astronomes observent depuis longtemps.

De l'eau sur Mars
Une vue en fausses couleurs des stries foncées (recurring slope lineae en anglais) sur les parois du cratère Hale à partir d’images de l’instrument HiRISE de Mars Reconnaissance Orbiter et d’un modèle 3D du terrain. Des observations du spectromètre CRISM sur cette même sonde ont détecté en 2015 la présence sur ces stries de minéraux hydratés qui ne peuvent se former qu’en présence d’eau liquide. Cette observation semble prouver l’existence sur Mars, de nos jours, d’écoulements intermittents et saisonniers d’eau liquide, une eau saturée en sels minéraux, ce qui lui permet de ne pas s’évaporer instantanément. Crédit : NASA/JPL Caltech/University of Arizona

Un lac souterrain

La détection d’une masse d’eau sous forme liquide est remarquablement récente puisqu’elle n’a été annoncée qu’en juillet 2018 après des observations de la sonde européenne Mars Express entre 2012 et 2015. Grâce à son radar MARSIS, la sonde a détecté la présence probable d’un lac souterrain sous une couche d’un kilomètre et demi de glaces et de poussières dans la région de Planum Australe près du pôle sud de Mars.

Un lac souterrain sur Mars
Un profile radar de la région entourant le lac souterrain détecté par Mars Express. La ligne blanche au sommet indique la surface glacée de Mars. En dessous, on voit une série de couches de glaces et de poussières typiques du pôle. Finalement, on aperçoit la surface solide de Mars et en particulier quelques zones très brillantes, indiquées en bleu, dont les propriétés suggèrent qu’il s’agit d’une poche d’eau liquide, probablement saturée de sel. Crédit : ESA/NASA/JPL/ASI/Univ. Rome

Mis à jour le 12/04/2024 par Olivier Esslinger