L’augmentation de la taille des télescopes au cours des siècles s’est traduite par un énorme gain dans la capacité de collecter la lumière, donc d’observer des objets de plus en plus faibles.
Par contre, elle ne s’est pas véritablement accompagnée d’une grande progression de la résolution angulaire des télescopes, c’est-à-dire leur capacité à observer des détails de plus en plus petits.
La turbulence atmosphérique
La responsabilité de ce manque de progrès incombe à l’atmosphère terrestre. Cette dernière est en effet constamment animée par des déplacements de masses d’air qui donnent naissance à ce que l’on appelle la turbulence atmosphérique.
La conséquence majeure de ce phénomène est de dévier en permanence et de façon aléatoire les rayons lumineux qui nous arrivent de l’espace. C’est par exemple la turbulence atmosphérique qui cause la scintillation bien connue des étoiles.
Pour l’astronome qui essaye de prendre une image d’un corps céleste, la turbulence atmosphérique se traduit par un flou de l’image, donc une perte de visibilité des petits détails et une diminution du contraste. Par exemple, l’image d’une étoile, au lieu d’être quasiment ponctuelle, ressemble plutôt à une grosse tache.
La turbulence atmosphérique empêche donc les grands télescopes d’atteindre leur résolution angulaire théorique. Le télescope du Mont Palomar, malgré ses cinq mètres et une énorme capacité de collecter la lumière, possède une résolution angulaire similaire à celle d’un télescope de 10 centimètres de diamètre.
Des sites astronomiques en altitude
Les astronomes ont depuis le début du siècle dernier cherché à surmonter, ou du moins à diminuer, les effets néfastes de la turbulence atmosphérique.
La première réponse au problème a consisté à essayer de minimiser le parcours de la lumière dans l’atmosphère en construisant des observatoires en altitude.
C’est ainsi que tous les grands télescopes modernes se trouvent au sommet de montagnes ou de volcans. Citons par exemple les télescopes au sommet du volcan Mauna Kea à 4200 mètres d’altitude dans les îles Hawaii, les télescopes de l’ESO à 2400 mètres d’altitude au Chili ou ceux de La Palma dans les îles Canaries également à 2400 mètres. Depuis ces sites montagneux, les images sont meilleures et la résolution angulaire est améliorée par un facteur deux ou trois.
L’observation depuis l’espace
Même dans les sites d’altitude, les effets de la turbulence atmosphérique sont encore très marqués. En fait, le meilleur moyen de les surmonter est de mettre un télescope en orbite autour de la Terre, à une distance à laquelle l’atmosphère n’est plus qu’un souvenir.
Dans le domaine visible, ceci s’est réalisé en 1990, lorsqu’une navette spatiale américaine a envoyé en orbite à une altitude de 600 kilomètres le télescope spatial Hubble, avec un miroir de 2.4 mètres de diamètre.
Débarrassé de l’atmosphère, le télescope spatial est capable d’atteindre la résolution angulaire théorique d’un instrument de sa taille et donc de battre tous les télescopes terrestres. Il donne maintenant des images d’une finesse exceptionnelle, faisant apparaître des détails parfois dix fois plus fins que ses concurrents terrestres.
De plus, ce gain en résolution angulaire s’accompagne d’un gain en contraste qui lui permet également d’observer des objets plus faibles.
Les capacités remarquables du télescope spatial lui ont permis d’opérer des percées majeures dans la plupart des domaines de l’astronomie, depuis l’étude du système solaire jusqu’à la cosmologie.
L’optique adaptative
Pendant que leur confrère spatial accumulait ses premiers succès, les télescopes terrestres ne restaient pas les bras croisés.
Les années 1990 ont en effet été marquées par le développement d’une nouvelle technique, appelée l’optique adaptative, qui permet aux télescopes de s’affranchir en partie des problèmes liés à la turbulence atmosphérique.
Un système d’optique adaptative analyse la lumière qui provient de l’objet étudié pour déterminer de quelle façon ses rayons ont été affectés par le passage dans l’atmosphère. Cette information est alors utilisée pour modifier la forme d’un miroir souple et déformable une centaine de fois par seconde.
Ces modifications de forme permettent de compenser les perturbations atmosphériques et la lumière réfléchie ressort pratiquement comme si elle n’avait jamais été perturbée.
Cette technique a déjà été utilisée avec succès sur plusieurs grands télescopes, dont le VLT de l’observatoire européen austral (ESO) au Chili.
Mis à jour le 11/09/2023 par Olivier Esslinger