Jusqu’au milieu du XVIIIe siècle, l’étude des étoiles autres que le Soleil était très limitée. Au contraire des planètes qui se déplaçaient dans le ciel et dont quelques détails étaient visibles dans un télescope, les étoiles étaient parfaitement immobiles et restaient ponctuelles même dans les meilleurs instruments. Leur étude se limitait à des mesures de coordonnées et à l’établissement de catalogues. Il semblait à cette époque que ces objets resteraient pour toujours inaccessibles et hors du champ de la science.
Le mouvement des étoiles
Un premier pas en avant fut accompli en 1718 lorsque Edmond Halley – le découvreur de la comète – mit en évidence que les étoiles n’étaient pas fixes dans le ciel. L’astronome s’était appliqué à mesurer la position précise de nombreuses étoiles et à comparer ses résultats avec des observations plus anciennes. Il se rendit alors compte que certaines positions ne correspondaient pas, ce qui ne pouvait s’expliquer que si les étoiles concernées s’étaient déplacées entre temps.
Le dogme de l’immuabilité des cieux perdait ainsi le peu de respectabilité qui lui restait. Les étoiles n’étaient pas fixées sur une immense sphère mais pouvaient librement se mouvoir les unes par rapport aux autres. Depuis la Terre, cela se traduisait par de légères modifications de leur position dans le ciel, de l’ordre d’une seconde d’arc par an pour les étoiles les plus proches.
L’étape suivante consistait à déterminer la distance qui les séparait de la Terre. Se trouvaient-elles juste aux limites du système solaire ou mille fois plus loin ou peut-être un million de fois plus loin ? Il s’agissait là d’une question fondamentale puisque qu’elle portait de manière plus générale sur la taille de l’Univers. Celui-ci était-il limité au système solaire ou s’étendait-il beaucoup plus loin ?
La méthode de la parallaxe
La première méthode que les astronomes développèrent pour mesurer la distance des étoiles reposait sur des mesures précises de position et sur le phénomène de parallaxe.
Pour comprendre celui-ci, vous pouvez faire une expérience très simple. Placez-vous à quelques mètres d’un mur. Allongez votre bras droit, levez un doigt et observez sa position par rapport au mur. Déplacez maintenant votre tête alternativement vers la gauche et la droite sans bouger le bras. La position apparente de votre doigt par rapport au mur doit changer. Cet effet, un changement de la position apparente d’un objet lointain dû à un déplacement de l’observateur, s’appelle la parallaxe.
Les astronomes furent amenés très tôt à essayer d’utiliser la parallaxe pour mesurer la distance des étoiles. En effet, si nous remplaçons votre doigt par une étoile proche et le mur par un fond d’étoiles très éloignées, le même phénomène se produit.
Du fait de la révolution de la Terre autour du Soleil, les observateurs terrestres sont en mouvement. La position apparente d’une étoile proche par rapport au fond constitué par les étoiles plus lointaines doit donc varier légèrement. Si le petit déplacement angulaire est mesurable, on peut à partir de quelques connaissances géométriques calculer la distance à l’étoile.
La distance des étoiles
La difficulté majeure pour cette technique réside dans le fait que même les étoiles les plus proches sont très distantes. Leur parallaxe, c’est-à-dire l’angle défini par leur mouvement apparent, est extrêmement faible. C’est pourquoi il fallut attendre 1837 pour qu’une première mesure soit réalisée.
Cette année là, l’astronome allemand Wilhelm Bessel détermina que l’étoile 61 Cygni présentait une parallaxe d’un tiers de seconde d’arc. Connaissant la valeur du rayon de l’orbite terrestre, 150 millions de kilomètres, il fut en mesure de calculer la distance à l’étoile, 100 000 milliards de kilomètres, soit 680 000 unités astronomiques ou 11 années-lumière.
Avec cette valeur, les astronomes prenaient enfin la mesure de l’immensité des espaces interstellaires et de la taille négligeable du système solaire par rapport à l’Univers. Les observations de ce type allaient aussi permettre de calculer la luminosité absolue des étoiles et de commencer à mieux comprendre leur vraie nature.
Le satellite d’astrométrie Hipparcos
La principale limitation à la méthode de la parallaxe est la présence de l’atmosphère. En effet, la turbulence atmosphérique déforme les images du ciel et impose une limite à la précision avec laquelle on peut mesurer la position d’une étoile, de l’ordre de quelques fractions de seconde d’arc. A cause d’elle, les mesures de distance par la méthode de la parallaxe ne donnent de bons résultats que jusqu’à une centaine d’années-lumière.
La solution moderne pour remédier à ce problème est de placer un instrument d’observation au-delà de l’atmosphère terrestre. C’est ce qui fut réalisé avec le lancement en 1989 d’un satellite d’astrométrie baptisé Hipparcos. Débarrassé des problèmes de turbulence atmosphérique, celui fut en mesure de déterminer la position des étoiles à quelques millièmes de seconde d’arc près et d’observer ainsi des parallaxes jusqu’à 1500 années-lumière du Soleil.
Mis à jour le 12/04/2024 par Olivier Esslinger