L’estimation de l’âge de l’Univers basée sur la constante de Hubble repose sur une approche cosmologique et sur l’hypothèse que notre description de l’évolution de l’Univers est correcte. Il convient donc d’essayer de vérifier cette estimation de façon indépendante. La nature fait bien les choses puisque l’expansion de l’Univers n’est pas le seul moyen que nous avons à notre disposition.
L’âge par la physique stellaire
Nous pouvons par exemple considérer les amas d’étoiles. Les astrophysiciens ont à leur disposition un moyen de déterminer l’âge d’un amas avec une précision de l’ordre de 10 pour cent en étudiant la forme de sa séquence principale. Il suffit d’utiliser cette méthode pour essayer de trouver l’âge des plus vieux amas d’étoiles de l’Univers, ce qui nous fournit une nouvelle évaluation minimale de l’âge de ce dernier indépendante de considérations cosmologiques.
L’analyse d’amas globulaires par cette technique a fournit une gamme d’âge assez large, entre 11 et 13 milliards d’années. L’imprécision provient de la méthode employée ainsi que de l’incertitude sur la distance des amas observés.
Une méthode similaire consiste à observer des étoiles individuellement. On peut citer un résultat du télescope spatial qui en 2002 se tourna vers l’amas globulaire M4, le plus proche de la Terre, à une distance de 5600 années-lumière. Le télescope analysa la lumière de naines blanches extrêmement âgées et permit la détermination de leur âge : entre 12 et 13 milliards d’années.
L’âge par la physique nucléaire
Nous pouvons aussi considérer des constituants plus fondamentaux : les noyaux atomiques. Comme les protons et neutrons qui constituent les noyaux ont une faible probabilité de se transformer les uns en les autres, les noyaux atomiques ne sont pas stables. Le temps caractéristique de leur évolution est appelé la période et on la définit comme l’intervalle de temps nécessaire pour que la moitié des noyaux d’un échantillon se soit transformée.
Pour l’uranium-235, par exemple, cette période est d’environ un milliard d’années. Si vous isolez un échantillon de 1000 noyaux d’uranium-235 à un temps donné, il ne restera que 500 noyaux de ce type après un milliard d’années, 250 après deux milliards, 125 après trois milliards et ainsi de suite.
Le mécanisme précédent peut nous permettre de déterminer l’âge des noyaux les plus anciens. Considérons par exemple l’uranium. Il existe dans la nature deux types principaux de noyaux d’uranium qui se distinguent par leur nombre de neutrons . Ainsi, un noyau d’uranium-235 contient 143 neutrons alors qu’un noyau d’uranium-238 en possède 146. Du fait de leur structure légèrement différente, ces deux noyaux ont une période différente : un milliard d’années pour l’uranium-235 et plus de six milliards pour l’uranium-238.
Si nous isolions un échantillon contenant une quantité identique des deux types de noyaux, nous nous retrouverions après un milliard d’années avec deux fois moins de noyaux d’uranium-235, mais avec un nombre de noyaux d’uranium-238 qui aura beaucoup moins changé. L’abondance relative des deux types change donc de manière prévisible. En mesurant l’abondance relative actuelle et en faisant une hypothèse sur l’abondance relative juste après le Big Bang, nous pouvons directement évaluer l’époque à laquelle les noyaux se sont formés.
Les estimations d’âge basées sur les noyaux atomiques sont malheureusement très imprécises, mais elles fournissent une estimation indépendante des autres méthodes. Les mesures d’abondances de divers noyaux comme l’uranium, le thorium, l’osmium ou le rhénium indiquent un âge compris entre 12 et 16 milliards d’années.
Des âges de l’Univers cohérents
De ces mesures, nous pouvons tirer une conclusion très importante. Toutes les estimations de l’âge de l’Univers, que ce soit d’après les modèles cosmologiques, les amas d’étoiles, les naines blanches ou les noyaux atomiques, sont en gros cohérentes entre elles. Aucune méthode ne donne un âge beaucoup plus grand ou petit que les autres, ce qui aurait pu se produire. Cet accord ne peut que renforcer notre confiance dans la vision actuelle de l’Univers que l’astrophysique nous propose.
Mis à jour le 22/12/2024 par Olivier Esslinger