L’évolution des nuages moléculaires géants
Les nuages moléculaires géants sont capables de résister à la force de gravité qui devrait les faire s’effondrer sur eux-mêmes. Plusieurs processus interviennent pour assurer une relative stabilité. D’abord, les étoiles proches réchauffent le gaz des nuages, ce qui se traduit par une agitation des molécules donc par une force de pression interne qui peut résister à la gravité. Ensuite, le nuage n’est pas immobile mais tourne sur lui-même. Les molécules de gaz sont de ce fait soumises à une force centrifuge qui les empêche de tomber vers le centre du nuage. Enfin, le champ magnétique interstellaire est également à l’origine d’une force contribuant à la stabilité.
Cette situation ne dure cependant pas éternellement car certains facteurs peuvent rompre l’équilibre et déclencher un effondrement gravitationnel. Une première possibilité est le passage du nuage dans une zone de haute densité de matière. Notre Galaxie n’a pas une répartition de matière uniforme mais contient des zones plus denses que la moyenne. Lorsqu’un nuage moléculaire géant traverse une de ces zones, il subit une force de compression qui peut rompre l’équilibre et provoquer un effondrement gravitationnel.
Une autre cause possible est l’explosion d’une supernova. Cet événement donne lieu à une formidable onde de choc qui compresse violemment les régions qu’elle traverse et peut donc provoquer l’effondrement gravitationnel d’un nuage moléculaire géant. C’est d’ailleurs ce scénario qui est retenu pour expliquer la formation du Soleil.
La masse de Jeans
Une fois la stabilité rompue, un nuage moléculaire géant ne va pas simplement se contracter. Il commence d’abord par se fragmenter en blocs de plus en plus petits. Ce processus fut étudié par le physicien britannique James Jeans qui montra au début du siècle qu’un nuage de gaz soumis aux exigences opposées de la force de gravitation et de la pression interne finit par se contracter si sa masse est supérieure à un certain seuil appelé la masse de Jeans.
Ce seuil est d’autant plus faible que le nuage est dense et d’autant plus grand que la température est élevée. Ainsi, un nuage dense se contractera plus facilement qu’un nuage ténu et, pour une densité donnée, un nuage froid s’effondrera plus aisément qu’un nuage chaud. La masse de Jeans dicte la taille des nuages susceptibles de s’effondrer et ce sont les variations de cette masse critique avec la température et la densité qui déterminent le déroulement des événements après la rupture de l’équilibre.
La fragmentation d’un nuage moléculaire
A l’intérieur du nuage moléculaire géant dont l’équilibre vient d’être rompu, des blocs de la masse de Jeans deviennent indépendants de l’ensemble et commencent à se contracter. Au fur et à mesure de la compression, la densité s’accroît dans chacun de ces blocs, ce qui y fait baisser le seuil critique de Jeans. En conséquence, une nouvelle série de fragmentations commence et chacun des blocs se subdivise lui-même en nuages plus petits et plus denses. La masse de Jeans continue donc à baisser et ainsi de suite. Une succession de divisions se déroulent qui donnent naissance à partir d’un nuage géant à une grande quantité de fragments de plus en plus petits.
Le processus de fragmentation finit par s’arrêter. Tant que les nuages étaient transparents, le rayonnement pouvait s’échapper librement et débarrassait le nuage de son surplus d’énergie. Mais à un certain moment, les blocs de gaz atteignent une densité suffisante pour devenir opaques et empêcher le rayonnement d’éliminer l’excès d’énergie. Par conséquent, la température du nuage qui était stable jusque là commence à monter, ce qui se traduit par une augmentation de la masse de Jeans. Les nuages les plus petits, apparus quand le seuil critique était au plus bas, sont alors trop peu massifs pour se fragmenter et tout le processus s’arrête.
La naissance d’une étoile
Lorsque la fragmentation s’arrête, chaque petit nuage de gaz est devenu une proto-étoile qui continue à se contracter et à s’échauffer en convertissant son énergie gravitationnelle en énergie thermique. Le rayonnement peut encore partiellement s’échapper. La température reste donc modérée et la lumière de l’étoile se situe dans l’infrarouge.
Mais la contraction continue et le gaz devient finalement opaque. La température de la proto-étoile atteint alors plusieurs milliers de degrés et l’astre se met à briller dans le domaine visible. Comme ses dimensions sont énormes, la proto-étoile est alors extrêmement brillante. A ce stade de sa vie, le proto-Soleil était par exemple cent fois plus brillant que de nos jours.
Au centre de l’astre, la densité et la température augmentent de plus en plus. Arrive finalement le moment où la température centrale atteint dix millions de degrés et où les réactions nucléaires de fusion de l’hydrogène se déclenchent. A ce moment, une énorme quantité d’énergie est produite et donne naissance à une pression interne qui s’oppose à la force de gravité et stabilise l’astre. La contraction s’arrête et c’est le début de la vie de l’étoile sur la séquence principale.
La durée de la formation d’une étoile est beaucoup plus courte que sa longévité sur la séquence principale. Elle dépend fortement de la masse de l’étoile considérée. Elle est ainsi de plusieurs dizaines de millions d’années pour une étoile comme le Soleil, mais de moins de 100.000 ans pour un astre de dix masses solaires.
Notons encore pour être complet que toutes les étoiles ne naissent pas dans des nuages moléculaires géants. Certaines, parmi les moins massives, se forment à partir de petits nuages moléculaires, appelés les globules de Bok, dont les dimensions peuvent descendre jusqu’à moins d’une année-lumière.
Mis à jour le 12/04/2024 par Olivier Esslinger