Les observations d’exoplanètes

Naine brune 2M1207
La première planète extrasolaire à être observée directement (à gauche) en orbite autour de la naine brune 2M1207 (au centre). Cette image a été prise en septembre 2004 par le télescope Yepun du VLT muni d’optique d’adaptative. Des observations ultérieures ont prouvé que les deux corps font partie d’un même système à 230 années-lumière de nous. La planète doit avoir environ cinq fois la masse de Jupiter et se trouve à une distance de son étoile d’environ deux fois la distance entre Neptune et le Soleil. Crédit : VLT/NACO

La première détection prouvée d’une planète extrasolaire ne fut pas en orbite autour d’une étoile classique mais autour d’un pulsar, PSR 1257+12, en 1992. L’étude de ce pulsar mit en évidence de faibles variations de période de son rayonnement radio. Celles-ci ne pouvaient s’expliquer que par des perturbations gravitationnelles provoquées par trois petits corps en orbite. Ces planètes se sont probablement formées après l’explosion de l’étoile originale en supernova car il est difficile d’imaginer que des planètes classiques puissent survivre à un tel cataclysme.

La détection de 51 Pegasi

La première détection prouvée d’une planète en orbite autour d’une étoile normale fut faite par Michel Mayor et Didier Queloz de l’observatoire de Genève vers la fin 1995. En observant avec une très grande résolution spectrale l’étoile 51 Pegasi, située à 50 années-lumière de nous, ils purent mettre en évidence de très faibles oscillations de la position des raies spectrales. Ils déterminèrent que la vitesse de l’étoile variait avec une période de 4,2 jours et une amplitude de 70 mètres par seconde. Ce résultat fut interprété comme la conséquence de l’influence gravitationnelle d’une grosse planète en orbite autour de 51 Pegasi.

A partir de la période et de l’amplitude des variations, Michel Mayor et Didier Queloz purent estimer la masse de la planète, environ la moitié de celle de Jupiter, et sa distance à l’étoile, environ 7,5 millions de kilomètres, soit seulement un vingtième de la séparation entre la Terre et le Soleil. A partir de cette distance, il fut possible de calculer la température moyenne de la planète, environ 1300 degrés, ce qui suggère que cette dernière est dépourvue d’atmosphère et partiellement ou complètement liquide.

Une profusion d’exoplanètes

Depuis la découverte de 51 Pegasi en 1995, de nombreuses planètes ont été identifiées avec certitude, en particulier à partir d’observations spatiales. Fin mars 2016, on comptait ainsi 2098 planètes dans 1342 systèmes planétaires différents. La méthode de la vitesse radiale avait identifié 656 planètes dans 495 systèmes planétaires. La méthode du transit avait révélé 1300 planètes dans 742 systèmes planétaires. La méthode de la microlentille gravitationnelle a quant à elle prouvé l’existence de 46 planètes. D’autres méthodes comme l’observation directe ou l’analyse du rayonnement radio de pulsars ont détecté un peu moins d’une centaine de planètes.

Une analyse des exoplanètes détectées

Les planètes découvertes jusqu’ici ne sont sans doute pas très représentatives de la population réelle car les observations sont affectées par un effet de sélection. La grande majorité des planètes extrasolaires observées sont en effet des géantes proches de leur étoile car ce type de planète est beaucoup plus facile à détecter. En réalité, il existe probablement une population de planètes beaucoup plus variée, comprenant en particulier des planètes plus petites comme la Terre ou Mars. Les observations actuelles permettent néanmoins déjà d’aboutir à des conclusions très intéressantes.

En termes de masse, la plupart des exoplanètes détectées sont des géantes gazeuses dont la masse se trouve entre environ 0,1 et 30 fois la masse de Jupiter. Il s’agit bien sûr d’un effet de sélection puisque les principales méthodes d’observation ne peuvent détecter facilement que les grosses planètes. D’un point de vue statistique, en prenant en compte cet effet de sélection, il est probable que les planètes de faible masse sont beaucoup plus communes dans la population réelle.

En terme d’orbite, la plupart des planètes sont plutôt proches de leur étoile, encore un effet de sélection. Une découverte intéressante est le fait que la majorité des planètes ont une orbite excentrique, c’est-à-dire plus elliptique que circulaire. Il s’agit là d’une différence majeure avec le système solaire où les orbites planétaires sont toutes plus ou moins circulaires. Notons que ceci n’est pas le fruit d’un effet de sélection, mais un fait réel qui pose un vrai défi aux théories actuelles de la formation des systèmes planétaires.

La majorité des exoplanètes ont été observées autour d’étoiles de la séquence principale de masse relativement faible donc de type spectral F, G et K (le Soleil est de type G). Là encore un effet de sélection puisque les recherches se concentrent sur ce type d’étoiles. Il semblerait cependant que la formation de planètes soit difficile autour d’étoiles plus massives à cause de phénomènes comme la photo-évaporation. Les observations montrent aussi que les étoiles contenant plus d’éléments lourds ont plus de chances d’être entourées de planètes.

Beta Pictoris b
La première observation directe du mouvement d’une exoplanète autour de son étoile. Le point central représente la position de l’étoile Beta Pictoris (qui a été enlevée de l’image). Les deux points à gauche et à droite sont des images de la planète Beta Pictoris b obtenues respectivement en 2003 et en 2009 par le Very Large Telescope (VLT) de l’ESO. Les deux grandes régions tout autour sont des traces du disque de poussière qui entoure l’étoile, une observation du télescope de 3,6 mètres de l’ESO à La Silla en 1996. La planète se trouve environ à la même distance de son étoile que Saturne de notre Soleil. Crédit : ESO/A.-M. Lagrange

Les planètes vagabondes

Notons encore que d’autres recherches ont également montré que l’espace interstellaire doit être peuplé d’un grand nombre de planètes qui se déplacent librement sans être en orbite autour d’une étoile.

Ces observations ont été possibles grâce au phénomène de microlentille gravitationnelle. Si une telle planète passe par hasard entre la Terre et une étoile plus lointaine, la planète déforme l’espace-temps autour d’elle et focalise les rayons lumineux de l’étoile. Vu de la Terre, cette focalisation fait apparaître l’étoile plus brillante, un phénomène temporaire qui ne dure que le temps de l’alignement, mais peut être détecté par nos télescopes.

La recherche de signes de microlentilles gravitationnelles dans la direction du centre galactique a révélé une dizaine d’objets isolés d’une masse similaire à celle de Jupiter, probablement des planètes. Il est théoriquement possible qu’il s’agisse d’étoiles de masse trop faible pour déclencher des réactions nucléaires et briller, mais la distribution de masse de l’échantillon suggère le contraire.

Ces planètes seraient nées autour d’une étoile, mais ont probablement été en interaction gravitationnelle avec une autre planète de leur système original et la force de gravité aura été suffisante pour les éjecter vers le milieu interstellaire.

Un alignement exact permettant l’effet de lentille gravitationnelle est très rare et le fait d’avoir détecter une dizaine d’événements indique que le nombre de planètes vagabondes doit être énorme. En extrapolant, on arrive à une estimation de 400 milliards de planètes de ce type dans la Galaxie, soit deux fois plus que le nombre d’étoiles !


Mis à jour le 12 janvier 2022 par Olivier Esslinger